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LA PI EN DEUX POINTS : POURQUOI / COMMENT
EPISODE 2 MARQUE ET DEGENERESCENCE : UN SUCCES TROP CHER PAYE

I – Pourquoi :

« Tu peux me prêter ton BIC® ? » « Zut j’ai oublié le THERMOS ® » « tu n’aurais pas un KLEENEX® s’il te plait ? » « Tiens passe-moi le SOPALIN® ! »

Qui n’a pas un jour prononcé ces mots, sans se rendre compte qu’il s’agit de marques, de signes protégés… ?

Si toute entreprise rêve de voir sa marque affichée partout et prononcée par tous, ce rêve peut rapidement tourner au cauchemar quand cette marque devient, dans l’inconscient collectif, un nom commun servant à désigner un produit ou un service.

En effet, selon l’article L.714-6-a du Code de la Propriété Intellectuelle, une marque encourt la déchéance pour dégénérescence lorsqu’elle est devenue du fait de son titulaire « la désignation usuelle dans le commerce du produit ou service » qu’elle désigne.

En d’autres termes, la marque aura perdu son pouvoir distinctif et ne remplira plus sa fonction de marque, qui est précisément de garantir aux consommateurs la provenance du produit ou du service et non pas de décrire une catégorie de produits ou services.

Toutefois, rassurez-vous, Chers titulaires de marques, le simple fait que votre marque soit devenue usuelle dans le commerce ne suffit pas pour que sa déchéance soit prononcée de façon automatique.

En effet, l’action en déchéance pour dégénérescence doit nécessairement être intentée par un tiers (personne physique ou morale). Il convient de préciser que, désormais cette action est portée devant l’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI).

Auparavant, seuls les tribunaux judiciaires étaient compétents en matière d’action en déchéance et, les parties devaient justifier d’un intérêt à agir.  Aujourd’hui, le requérant n’a plus besoin de démontrer un intérêt à agir et va devant l’INPI, ce qui devrait favoriser/accroitre le nombre des demandes d’actions en déchéance…

Ainsi, selon l’article L716-5 du Code de la propriété intellectuelle, l’INPI dispose d’une compétence exclusive pour les actions en déchéance lorsqu’elles sont faites à titre principal et, le juge judiciaire est compétent, quant à lui, pour les demandes à titre reconventionnel.

Le demandeur à l’action devra prouver que la marque est devenue la désignation usuelle d’un produit (ou d’une de ces caractéristiques) et que cet usage s’est répandu sans que le titulaire de la marque tente d’y mettre un terme.

Deux conditions cumulatives doivent ainsi être remplies pour que la déchéance soit prononcée.

Fort heureusement, le titulaire de la marque n’est donc pas désarmé face à la notoriété de sa marque, notoriété qu’il a certes voulue et souhaitée, mais pas au moins d’être dépossédé de sa marque…

II – Comment :

On attend du titulaire qu’il joue un rôle actif dans la défense de sa marque et qu’il fasse preuve d’une réelle vigilance et intervienne pour éviter que sa marque ne devienne un nom commun.

Toutefois, on ne se contentera pas d’une seule action contre un concurrent, tout en laissant les magazines utiliser librement sa marque comme un nom commun.

Cette politique de défense devra être réelle, suffisante, proportionnée et être menée tout au long de la vie de la marque.

Ainsi, le titulaire de la marque devra non seulement mener une campagne auprès du public sur Internet, dans la presse etc., mais également agir systématiquement en adressant des courriers de mise en demeure à ses concurrents et des lettres de mise en garde aux journaux, magazines et revues.

Autre action indispensable : la mise en place de surveillances et de veilles sur Internet.

On pensera également à utiliser la marque en association avec des symboles comme ® ou ™ sur les packagings ou les supports de communication, afin de rappeler au public que la marque est enregistrée et de faire en sorte que les dictionnaires en fassent également mention si requis (notamment avec le nouvel art L 713-3-4 du CPI).

Il est en outre essentiel de conserver au fil des ans, toutes les preuves justifiant de cette veille et de ces démarches proactives, attestant d’une vraie lutte contre tout risque de dégénérescence de son signe.

Une politique de prévention, mais aussi de répression, devra donc impérativement être mise en place pour ne pas se voir reprocher sa passivité dans la dégénérescence de sa marque. Et, nul besoin de rappeler que les conséquences de la perte / l’absence de valeur des droits de marques peuvent être très préjudiciables.

Il s’agit là de recommandations minimales. Notre cabinet reste à votre entière disposition pour analyser votre situation et mettre en place une politique adaptée de défense de vos marques.

Nawel Triba est Conseil en Propriété Industrielle et cumule une expérience de plus de 10 ans en cabinets d’avocats et cabinets de conseil en propriété industrielle. Elle a rejoint Santarelli en 2018 et est titulaire du CEIPI « Marques et Dessins et Modèles » de l’université de Strasbourg. Nawel gère des portefeuilles mondiaux de droits de propriété intellectuelle pour des clients exerçant dans des domaines d’activités variés.