Ce projet, appelé « Paquet Modèles » à l’instar du « Paquet Marques » de 2015, se compose d’une proposition de refonte de la directive 98/71/CE du 13 octobre 1998 (COM (2022) 667), et d’une proposition de modification du Règlement (CE) n° 6/2022 sur les dessins et modèles de l’Union européenne (COM (2022) 666), et d’abrogation du règlement (CE) n° 2246/2002 de la Commission concernant les taxes au titre de l’enregistrement. 

Adapter le système de protection des dessins et modèles aux avancées technologiques et à l’ère du numérique

D’abord, le projet de réforme modernise la définition de « dessin ou modèle » et de « produit ». Les premiers englobent désormais « le mouvement, les transitions ou tout autre type d’animation », tandis que la notion de « produit » est étendue aux articles qui se présentent sous forme numérique (art. 2 COM (2022) 667 ; art. 3 COM (2022) 666).

Ensuite, la nouvelle réglementation introduit la possibilité de reproduire le dessin ou modèle de manière dynamique ou animée à l’aide de nouvelles technologies, y compris « par croquis, photographie, vidéo ou imagerie/modélisation informatique » (art. 26 COM (2022) 667).

Enfin, la portée des droits est également adaptée aux avancées technologiques, telle que l’impression 3D par exemple, par l’ajout d’une nouvelle interdiction d’utilisation des dessins ou modèles enregistrés à tout tiers concernant « la création, le téléchargement, la copie et le partage ou la distribution à autrui de tout support ou logiciel enregistrant le dessin ou modèle en vue de permettre la réalisation d’un produit dans lequel le dessin ou modèle est incorporé ou auquel celui-ci est appliqué» (art. 16 d) COM (2022) 667 ; art. 19 d) COM (2022) 666).

Lutter contre la contrefaçon

La Commission européenne propose aux titulaires de dessins ou modèles de faire figurer sur les produits les incorporant le symbole  afin de signaler au public que ledit dessin ou modèle est enregistré et d’éviter qu’il soit contrefait (art. 24 COM (2022) 667 ; art. 26 bis COM (2022) 666).  

Pour mieux lutter contre le phénomène de la contrefaçon, le projet de réforme prévoit également la possibilité de retenir en douane, sans qu’ils soient mis en libre pratique, des produits incorporant des dessins ou modèles enregistrés sans l’autorisation du titulaire. Ainsi, les produits contrefaits en transit, en transbordement par le territoire de l’Union européenne ou de l’Etat membre concerné pourront faire l’objet d’une retenue douanière. Ce droit s’éteint toutefois au cas où le détenteur des produits prouve que leur commercialisation est licite dans le pays de destination finale (art. 16.3 COM (2022) 667 ; art. 19 COM (2022) 666).

Le projet de réforme prévoit également d’ajouter une présomption de propriété (art. 11 et 12 COM (2022) 666) en faveur du déposant ou du titulaire enregistré du dessin ou modèle. Il sera réputé avoir qualité pour agir dans toute procédure relative audit dessin ou modèle et notamment dans le cadre des procédures en contrefaçon.

Préserver les intérêts légitimes des tiers

D’abord, la proposition de Directive étend aux dessins et modèles nationaux le moyen de défense fondé sur l’utilisation antérieure de bonne foi, Ce moyen de défense permet aux tiers de continuer à exploiter un dessin ou modèle déjà exploité de bonne foi antérieurement au dépôt de celui-ci (art. 21 COM (2022) 667).

Ensuite, sont ajoutés à la liste exhaustive des limitations aux droit exclusifs conférés par l’enregistrement les « actes accomplis afin d’identifier un produit ou d’y faire référence comme étant celui du titulaire du dessin ou modèle » et les « actes accomplis à des fins de commentaire, de critique ou de parodie » (art. 18 COM (2022) 667 ; art. 20 COM (2022) 666). 

Faciliter la procédure d’enregistrement et l’accès à la protection

La proposition de Règlement préconise de fusionner les taxes d’enregistrement et de publication en une taxe de dépôt unique, en réduisant de cette manière le montant global de la taxe (art. 36.4 COM (2022) 666).

De plus, il est proposé de supprimer la règle de l’ « unité de classe », permettant ainsi de grouper plusieurs dessins ou modèles en une demande d’enregistrement multiple sans que tous les produits dans lesquels ils seront incorporés fassent partie de la même classe de la classification internationale de Locarno pour les dessins et modèles industriels (art. 27 COM (2022) 667 ; art. 37 COM (2022) 666).

En outre, le projet de réforme introduit la possibilité pour les demandeurs qui souhaitent conserver la confidentialité du dessin ou modèle de demander l’ajournement de la publication pendant un délai de 30 mois à compter de la date de présentation de la demande ou de la date de priorité (art. 30 COM (2022) 667 ; art. 50 COM (2022) 666). La durée d’ajournement de publication est actuellement de 3 ans en France.

Enfin, la proposition de Directive instaure à l’instar de la réforme du « Paquet Marques » que les Etats membres prévoient une procédure administrative de déclaration en nullité des dessins ou modèles enregistrés sans avoir à saisir la justice (art. 31 COM (2022) 667).

Bien que modérée, cette réforme était indispensable afin de moderniser un système de protection performant mais désormais obsolète. La proposition de réforme sera maintenant transmise au Conseil et au Parlement européen.

Mai 2023

Elia Chiappini, Juriste Santarelli

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