La Juridiction Unifiée du Brevet (JUB) s’est prononcée sur le traitement de la contrefaçon par équivalence, apportant des précisions attendues sur les critères d’appréciation.
Cette décision constitue un repère important pour les titulaires de brevets et les praticiens en matière de contentieux.
Afin de pouvoir statuer sur la contrefaçon d’un objet revendiqué, un juge doit tout d’abord vérifier si un contrefacteur présumé reproduit les moyens essentiels de l’invention telle que revendiquée, c’est à dire les moyens nécessaires et suffisants pour que l’invention résolve le problème technique.
Si le contrefacteur reproduit toutes les caractéristiques du produit revendiqué, ou toutes les étapes dans le cas d’un procédé, il s’agit d’une copie dite servile, ce qui constitue alors une contrefaçon littérale de l’objet revendiqué. Toutefois, la contrefaçon ne se limite pas à la seule reproduction littérale de toutes les caractéristiques de l’objet revendiqué.

En effet, les juges peuvent également appliquer le principe de contrefaçon par équivalence dont le but est d’empêcher un tiers de contourner les risques de contrefaçon littérale en remplaçant un moyen de l’invention.
Une notion encore peu harmonisée en Europe
Si certains types de contrefaçon semblent d’ores et déjà cadrés par l’accord sur la Juridiction Unifiée des Brevets (articles 25 et 26 de l’accord), ce n’est pas le cas de la contrefaçon par équivalence. Une difficulté d’application de cette notion au niveau européen est qu’elle est appréciée différemment d’un pays à l’autre.
En France, on parle de contrefaçon par équivalence lorsqu’un moyen est reproduit sous une forme différente, tout en remplissant une même fonction (ou présentant un même effet technique), pour un résultat semblable.
En Allemagne, la contrefaçon par équivalence est plus nuancée : le moyen doit avoir le même effet technique, être déductible des revendications par un homme du métier et ne pas déjà exister dans l’état de la technique ou être brevetable.
En Italie, elle est plus restrictive : le moyen doit remplir la même fonction et de la même manière pour aboutir au même résultat que le moyen breveté.
Le rôle de la JUB et les perspectives
À ce jour, l’accord relatif à la juridiction unifiée des brevets a seulement codifié l’interprétation des revendications via l’article 69 de la Convention sur le Brevet Européen.
Un des intérêts majeurs des premières années de la JUB sera donc de préciser l’interprétation de la contrefaçon par équivalence par rapport aux différents principes nationaux et de poser une jurisprudence harmonisée.

Les juges ne pourront pas se baser uniquement sur la jurisprudence d’un pays mais devront créer un compromis applicable quel que soit le cas.
Conclusion
La contrefaçon par équivalence reste une notion complexe et encore peu harmonisée au niveau européen. Les premières décisions de la JUB seront déterminantes pour clarifier cette question et offrir une meilleure prévisibilité aux titulaires de brevets comme aux tiers.
Octobre 2023