L’audit de la propriété intellectuelle (aussi connu sous la dénomination IP Due Diligence) et notamment des brevets est incontournable lors des levées de fonds des start-up.
La nécessité pour les start-up de protéger leurs inventions en les brevetant n’est plus à démontrer, et elles en sont généralement conscientes. Il s’agit bien souvent du principal actif de la start-up à valoriser, au moins qualitativement, pour les investisseurs potentiels.
Mais le simple fait d’avoir déposé un ou plusieurs brevets pour protéger la technologie n’est pas suffisant pour sécuriser la levée de fonds et les investisseurs sont bien avisés de se pencher plus avant sur ces droits de propriété industrielle avant d’engager des fonds : titularité, portée et liberté d’exploiter sont les maîtres mots des Due Diligence.

S’assurer de la titularité des droits de brevet
L’attention devra être portée en premier lieu sur la titularité de ces droits de brevet : en France, l’invention appartient de fait à son inventeur, ou à son employeur sous certaines conditions du contrat de travail ; mais le brevet appartient à celui qui en fait la demande et le dépose à l’INPI (Institut National de la Propriété Industrielle chargé de la délivrance des brevets en France).
Il n’est pas rare que les brevets appartiennent au(x) fondateur(s) de la start-up et non à la société elle-même ; ou inversement, que la société a bien déposé un brevet en son nom alors qu’elle ne détient pas effectivement les droits sur l’invention !
Autant de situations délicates à détecter et à traiter en amont des investissements, au risque de déconvenue financière après le deal.
Mesurer la portée de la protection par brevet
Tout aussi cruciale est l’évaluation de la portée exacte de ce qui est protégé par les brevets détenus par la start-up.
Lorsqu’il s’agit par exemple d’un nouveau produit dont on veut accélérer le développement et l’entrée sur le marché, ce produit est-il protégé dans sa globalité ? Ou n’est-ce qu’un mode de réalisation spécifique ou une sous-partie du produit qui fait l’objet du brevet ? Y-a-t-il plusieurs brevets pour protéger non seulement ce que la start-up envisage de commercialiser mais également des solutions alternatives, qui pourraient sinon être développées par des concurrents et venir prendre des parts de marché ?
Car pour mémoire, un droit de brevet est un droit d’interdire aux tiers de fabriquer et commercialiser ce qui fait l’objet de la protection conférée par le brevet.
L’exclusivité dont bénéficie la start-up par la délivrance de ses brevets sur certains territoires doit être mise en regard des prévisions de développement et de commercialisation du Business Plan.
Cette évaluation nécessite une analyse fine des brevets et de leur procédure d’examen par les Offices de brevets afin de connaitre la portée réelle du brevet après délivrance, portée qui est parfois plus restreinte que celle qui avait été escomptée lors du dépôt de la demande de brevet.

S’assurer de la liberté d’exploitation pour éviter tout risque de litiges en contrefaçon
Finalement, et probablement encore plus critique, la start-up a-t-elle bien vérifié que les technologies qu’elle souhaite lancer sur le marché ne viennent pas elles-mêmes contrefaire des brevets existants détenus par des concurrents ?
Cette vérification est primordiale pour éviter que le lancement d’un produit ne se trouve entravé par une réclamation ou des actions en justice pour contrefaçon de brevets.
Cet examen doit être conduit au vu des produits qui seront effectivement commercialisés par la start-up (que ces produits aient eux-mêmes fait l’objet d’un dépôt ou non de brevets), et en fonction des marchés et pays de commercialisation envisagés.
Cette notion de libre exploitation, mieux connue sous l’appellation anglo-saxonne Freedom to Operate (FTO), est d’autant plus importante que la levée de fonds ou le rachat d’une société a souvent pour effet de mettre un coup de projecteur sur les activités de celle-ci et donc d’attirer l’attention des concurrents potentiels. Ces derniers peuvent voir d’un mauvais œil ce nouvel opérateur croître et souhaiter défendre leurs parts de marché en faisant valoir à juste titre leurs droits de brevet.
Vous l’aurez compris, c’est l’ensemble de ces évaluations qui devrait être couvert par un audit brevet au moment des Due Diligence commanditées par les investisseurs avant toute transaction, bien en amont du closing.
Et c’est à cet exercice que doivent se préparer les start-up en anticipant ces différentes problématiques dans leur stratégie de protection de la propriété industrielle. D’autant plus que les conclusions d’un audit sont souvent forces de propositions et une occasion d’améliorer sa politique de protection de Propriété Intellectuelle.
Septembre 2023