• Une solution technique à un problème technique : l’invention doit résoudre un problème technique clairement identifié
  • La nouveauté : Le logiciel doit être nouveau et ne pas avoir été divulgué au public avant la demande de brevet.
  • L’inventivité : Le logiciel doit impliquer une activité inventive, c’est-à-dire qu’il ne doit pas être une simple combinaison évidente d’éléments connus

L’application industrielle : Le logiciel doit avoir une application industrielle pratique.

À titre d’illustration, une décision des chambres de recours de l’Office Européen des Brevets a confirmé que l’utilisation d’un réseau neuronal pour la surveillance des battements cardiaques afin de détecter des irrégularités constituait une invention technique (décision T 0598/07 du 19/05/2010).

La contrefaçon de brevets logiciels est une problématique récurrente.
Pour démontrer une contrefaçon, il est souvent nécessaire d’analyser le code source du présumé contrefacteur afin de vérifier s’il implémente les caractéristiques brevetées. Par exemple, en France, il faudra généralement organiser une saisie-contrefaçon pour récupérer ce code source et obtenir les preuves nécessaires à une action en justice.

Faire appel à un expert en propriété intellectuelle et en analyse logicielle est une étape essentielle pour identifier et prouver la contrefaçon d’un brevet.
Une expertise technique permet d’établir une correspondance entre l’invention brevetée et la technologie exploitée par un tiers, ce qui est un élément clé dans une procédure de défense des droits de propriété industrielle.

Les technologies d’intelligence artificielle (IA) sont aujourd’hui au cœur des stratégies d’innovation, tous secteurs confondus. Ce dynamisme se traduit par une croissance exponentielle des demandes de brevets portant sur l’IA à l’échelle mondiale, en particulier dans des domaines comme la vision par ordinateur, le traitement du langage naturel, ou encore les systèmes prédictifs. 

La Chine domine très largement cette course, en volume de dépôts, devançant les États-Unis, la Corée du Sud et l’Europe. Ce mouvement reflète une tendance lourde : l’IA n’est plus seulement une technologie d’avenir, elle est désormais un actif stratégique à protéger. 

Pourtant, en Europe comme en France, des idées reçues persistent sur la brevetabilité des inventions liées à l’IA, souvent perçue comme un domaine exclu du champ des brevets. En réalité, il est tout à fait possible de breveter des solutions techniques mettant en œuvre ou exploitant l’IA, sous réserve de satisfaire certains critères de brevetabilité.

Pour maximiser les chances d’obtention d’un brevet, il est conseillé de :
  • Démontrer son caractère non évident.
  • Bien détailler le modèle d’IA utilisé
  • Expliquer en quoi son fonctionnement apporte une solution technique

Si les inventions mettant en œuvre de l’intelligence artificielle peuvent faire l’objet d’une protection par brevet, leur traitement par les offices de propriété industrielle soulève plusieurs enjeux techniques, juridiques et stratégiques qu’il convient d’anticiper dès la phase de développement.
Voici les principaux points de vigilance à intégrer dans votre démarche :

Ne pas sous-estimer les critères classiques de brevetabilité

Même dans un domaine innovant comme l’IA, les critères fondamentaux restent incontournables : nouveauté, activité inventive, application industrielle et surtout caractère technique de l’invention.
Une IA « en tant que telle » n’est pas brevetable, mais une solution technique mettant en œuvre l’IA pour résoudre un problème technique, elle, peut l’être.

Expliquer clairement l’apport technique dans la demande de brevet

Les offices, notamment l’OEB, sont particulièrement attentifs à la clarté de la contribution technique : Quel problème technique est résolu ? Par quels moyens techniques ? En quoi l’IA y joue-t-elle un rôle déterminant, au-delà d’un simple outil générique ? 

Vous assurer de vos droits sur les données utilisées pour l’entraînement

L’entraînement d’un modèle d’IA repose souvent sur des bases de données massives. Or ces données peuvent être protégées par des droits d’auteur ou des droits sui generis. Entrainer une IA sans l’accord express du titulaire de la base de données reviendrait à violer ses droits et vous exposerait à des sanctions telles que :

  • Des dommages-intérêts importants (pouvant inclure le manque à gagner et le préjudice moral),
  • L’interdiction judiciaire d’exploitation de l’IA formée illicitement.

Toute la chaîne de valeur de l’IA pourrait ainsi être compromise, même si elle est performante techniquement.

Anticiper la titularité des droits sur les contributions IA

Un point juridique spécifique aux inventions obtenues par une IA concerne la désignation de l’inventeur. Aujourd’hui, ni l’OEB ni l’USPTO ne reconnaissent une IA comme inventeur. Seule une personne physique peut être désignée. Ainsi, il est courant de désigner comme inventeur le chercheur ou l’ingénieur ayant conçu et entraîné l’IA.

Attention à la nature des licences open source utilisées

Il en existe deux types :

  • Les licences dites permissives sont réutilisables pour créer du code.
  • En revanche, dans le cas de licences « copyleft » l’intégration du code copyleft dans votre propre code rend public l’ensemble de votre code. Vous en perdez ainsi la titularité des droits de propriété intellectuelle.
Contexte technique

Une entreprise spécialisée dans les dispositifs médicaux a développé un système d’aide au diagnostic basé sur l’IA, destiné à l’analyse automatique d’images radiologiques (IRM, scanner).

Fonctionnement de l’invention

Le système comprend :

  • un module de prétraitement d’images,
  • un modèle d’apprentissage profond (deep learning) entraîné pour détecter des anomalies spécifiques (ex. : microcalcifications, tumeurs),
  • une interface utilisateur permettant au médecin de visualiser les résultats avec un indice de fiabilité associé à chaque détection.
Pourquoi l’invention est brevetable
  • Le problème technique est clairement identifié : il s’agit d’améliorer la fiabilité et la rapidité du diagnostic d’anomalies complexes non visibles à l’œil nu.
  • L’IA apporte une solution technique : l’intégration d’un algorithme d’IA entraîné sur des jeux de données cliniques afin de fournir une assistance interprétative, avec un scoring automatique de précision.
  • Lien clair entre l’IA et la finalité technique : l’IA n’est pas un simple outil d’analyse statistique, elle est au cœur d’un processus technique et médicalement utile.

La contribution technique étant considérée comme allant au-delà d’une simple implémentation d’un algorithme abstrait, le brevet a été accordé par l’OEB.

Mai 2025

Adrien Betrancourt, cabinet Santarelli, ingénieur brevet

Adrien Bétrancourt

Ingénieur | Associé

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